Monsieur le Ministre,
Nous, organisations engagées au chevet des travailleurs indépendants, souhaitons attirer votre attention sur la situation actuelle.
En effet, les travailleurs indépendants sont toujours en extrême difficulté en cette rentrée. A plusieurs reprises, par sondage direct auprès d’un nombre important d’entre eux, nous avons mesuré l’état de leur relance économique. Et force est de constater qu’elle ne vient pas. Les résultats de ces enquêtes confirment régulièrement les pires prévisions : les indépendants soumis directement ou indirectement aux restrictions sanitaires (annulations de marché, report des festivités, impossibilité de se rendre dans les ERP ou les lieux de santé...) subissent de plein fouet le choc économique.
Certes, au cours du confinement, la compensation de l'Etat a été à la hauteur. Les travailleurs indépendants ont eu recours en masse aux dispositifs en place durant cette période, et nos organisations saluent avec unanimité les efforts faits par la puissance publique pour maintenir ces activités et aider les indépendants à survivre.
De même, l’annonce faite jeudi 15 octobre d’un soutien supplémentaire aux travailleurs indépendants pendant le couvre-feu est une bonne nouvelle, ce d’autant que le dispositif mis en place correspond à celui activé lors du confinement.
Mais la fermeture du fonds de solidarité à de nombreux autres travailleurs a condamné leur survie potentielle. Chez les auto-entrepreneurs par exemple, seuls 30% ont pu réaliser un chiffre d'affaires supérieur à 50% de leur chiffre d’affaires habituel en septembre. Et si certains secteurs sont un peu moins pénalisés (santé, services à la personne), d'autres sont très durement impactés : conseil, formateurs, prestations d’accompagnement, prestations informatiques, marketing, commerce, transport, BTP, attachés de presse culture... Très souvent, ce sont même des secteurs assez éloignés des activités dites “touchées” par la crise (restauration, tourisme ou événementiel).
Une grande partie des travailleurs indépendants ne voient pas leur chiffre d'affaires décoller d’ici Noël, et alors même que cette période correspond à une forte activité économique liée aux fêtes de fin d’année ou aux projets “à boucler” en fin de budget dans les entreprises. Quand on compare cette prévision avec la reprise des appels de cotisations sociales, le mur de dettes qui approche sera quasiment impossible à franchir pour nombre d’entre eux.
Nous demandons avec force et insistance la réouverture du fonds de solidarité dans son volet 1 pour tous les travailleurs indépendants, et ce de façon rétroactive. Si la classification par code NAF semblait initialement partir d’une intention louable, à savoir resserrer le dispositif d’aide et inciter à la relance, elle nous apparaît aujourd'hui contre-productive. D’abord parce qu’elle instaure une complexité indéniable, avec un inventaire à la Prévert, dans laquelle les indépendants sont perdus, et qui fait apparaître de nombreuses incohérences (vendeurs de livres sur les marchés, mais pas artisans qui vendent sur les marchés, pécheurs mais pas pet sitters, community managers mais pas rédacteurs web, vendeurs de marchandises aux professionnels, mais pas pour ceux qui vendent aux particuliers...). Ensuite parce qu’elle instaure de facto des mesures de vérification et de contrôle qui rendent le délai de versement beaucoup plus long que lors du confinement (nous recevons quotidiennement des témoignages d'indépendants qui attendent encore une réponse pour juillet). Enfin, parce qu’elle repose sur un code NAF dont la seule valeur statistique ne fait qu'ouvrir le champ aux litiges.
Cet état de fait nous atterre et doit vous alerter : partout sur le terrain, l'incompréhension est vive, les critiques au sujet de l’arrêt brutal du fonds de solidarité sont véhémentes. Alors que le plan de relance est massif, que votre gouvernement communique sur un montant global de 35 milliards pour 2021, les petits entrepreneurs se sentent abandonnés. D’autant que le fonds est encore doté de 2 milliards non consommés à date.
Il est impératif d'ouvrir le fonds de solidarité à tous au moins jusqu'à fin 2020 pour éviter les radiations massives et sauver les structures en grand danger : c'est cela, optimiser les fonds publics !
Afin de prolonger la présentation de ces modalités nous vous proposons de vous rencontrer, selon votre convenance.
Dans cette attente, nous vous prions de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de notre haute considération.
Les organisations signataires
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